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Aussi malgre le soin que j'apporte pour mettre le nom de l'auteur et la reference des illustrations sur tous ces textes , il se pourrait que ce soit insuffisant
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Mon but etant de les faire connaitre uniquement pour la gloire de leurs Auteurs

Fixation du texte massoretique

 

 חומש עם הערות מסורה בשולי הטקסט


Fixation du texte massoretique





Les cinq lettres en hébreu et en araméen, dont la forme finale (en rouge) est sans équivalent dans l'alphabet paléo-hébraïque
Le texte hébreu ancien était, en toute probabilité, écrit en continu, sans interruption. Les premiers Massorètes eurent pour tâche:
  • la division en mots, livres, sections, paragraphes, versets et clauses (probablement dans l'ordre chronologique énuméré ci-avant)
  • la fixation de l'orthographe, de la prononciation et de la cantillation
  • l'introduction ou l'adoption définitive du ktav ashouri (l'écriture hébraïque carrée), dont quelques lettres contiennent, contrairement au ktav ivri (l'alphabet paléo-hébraïque), une variante contextuelle en fin de mot pour cinq lettres (mem, noun, tsade, pe, kaf)
  • l'énumération des lettres, mots, versets, etc.
Les Soferim introduisirent en outre certains changements textuels pour prémunir du blasphème et apparentés, appelés les Tiḳḳoune Soferim (amendements des Scribes). De même, la notation en marges indiquant la substitution de certains mots par d'autres lors des lectures publiques, et réciproquement, est parfois considérée comme une prévenance des Soferim à l'égard du Texte, dont ils ne se seraient pas permis de modifier la moindre lettre, mais nécessitant un « commentaire » ou une correction pour des raisons esthétiques, grammaticales, théologiques, etc. Comme aucune addition au texte officiel de la Bible n'aurait été permise, ces Massorètes ont dû adopter d'autres expédients, comme marquer les diverses divisions par divers espacements, les parashiot. Ils ont aussi donné des indications donnant matière à un enseignement halakhique (déduction d'une loi) ou aggadique (déduction d'une parabole) avec l'épellation pleine ou défective des mots, la forme particulière de lettres (plus grandes, plus petites, brisées, inversées, etc.), des points et d'autres signes.
Les notes marginales ne furent permises que dans les copies privées. La première mention de telles notes est trouvé dans le cas de Rabbi Meïr.
Le texte traditionnellement fixé était appelé, particulièrement par rapport à son orthographe, Massoret ; la prononciation traditionnelle, Miqra (littéralement, « lecture ») ; la division en clauses et versets, nécessaire à la bonne récitation ou cantillation, pissouq te'amim ou hekhra.
Il est difficile de déterminer quelle massore possède la plus grande ancienneté. Il est d'une part connu que les notes marginales étaient en usage au début du iie siècle ; cependant, il y a toutes les raisons de penser que les baraïtot massorétiques (traditions exégétiques se fondant sur les notes massorétiques, qui n'ont pas été incluses dans la Mishna mais dont certaines se retrouvent dans la Guemara) n'ont pu se développer beaucoup plus tard.
De plusieurs textes et auteurs juifs de l'époque antique, on peut conclure que le texte massorétique avait été fixé ou était considéré comme tel, dès le IIème AEC, voire un siècle plus tôt, et qu'il était perçu comme l'exacte transcription du textus receptus:
  • selon le Talmud, le rouleau de la Torah originel était exposé dans la cour du Temple à disposition des copistes; parmi les dignitaires du Temple se trouvaient en outre des correcteurs payés des textes bibliques;
  • une telle copie est mentionnée dans la lettre du Pseudo-Aristée
  • Philon d'Alexandrie et Flavius Josèphe affirment que le texte de la Torah n'a jamais été altéré.
Toutefois, une autre tradition orale, peut-être antérieure à la première, rapporte que trois Livres furent trouvés dans la cour du Temple, et que chacun possédait des variations par rapport à l'autre; l'on choisit de suivre pour ces passages controversés la version de deux rouleaux sur trois.

La période rabbinique 

En supposant cependant le texte fixé à l'époque du Second Temple, il fallut tout de même des siècles pour atteindre une certaine uniformité parmi les copies en circulation. Le texte standard, s'il a existé, se trouvait à Jérusalem, et n'était d'usage que pour ceux qui pouvaient s'y rendre, ce qui n'était le cas que d'une minorité de Juifs, les autres vivant en diaspora. Les fautes de copiste semblent avoir été si fréquentes, que les Sages du iie siècle EC ont jugé nécessaire de mettre en garde contre les mauvaises copies.

Le nombre de copies du texte originel (supposé) se réduit drastiquement lors de la destruction de Jérusalem en 70 EC, ce qui renforce la nécessité d'une préservation du texte. De nouvelles traductions grecques, par Aquila et Théodotion sont également réalisées au siècle suivant, beaucoup plus fidèles que la Septante à ce qui est actuellement connu comme le texte massorétique.
Une emphase mise sur des détails lexicaux, dont l'épellation d'un nom, sert déjà de base à l'argumentation chez les Pharisiens, en particulier chez Rabbi Akiva, qui affirme que « la Massore est une haie à la Torah. » Le concept d'un Texte parfait, sanctifié jusque dans ses bases consonantiques, se répand dans les communautés juives, à grand renfort de sentences dans la littérature légale, les récits légendaires, et la pensée juive ; ces mesures de plus en plus strictes aboutissent à la déclaration de Moïse Maïmonide, au xiiie siècle, qu'une déviation fut-ce d'une seule lettre suffit à rendre un rouleau de Torah invalide.
C'est à une date inconnue, mais en se basant sur du matériel tannaïtique, qu'est rédigé le traité Soferim, par un auteur vivant en terre d'Israël. Inclus dans les traités mineurs, il résume les halakhot (règles) auxquelles un scribe doit se conformer dans l'exercice de sa fonction:

L'âge des Massorètes 


Le texte massorétique actuel acquiert finalement sa prédominance grâce à la réputation des Massorètes, réunis en écoles de scribes et docteurs de la Bible ayant œuvré entre le viie siècleet le xie siècle EC, établies principalement à Tibériade, mais aussi à Jérusalem et en Babylonie. Ces écoles développent un tel prestige quant à l'exactitude et le taux d'erreur minimal de leurs copies, que leurs textes sont établis en autorité sur les autres.
Ce sont également les Massorètes qui inventent, élaborent et finalisent le système de signes graphiques qui indiquent la prononciation traditionnelle, la construction syntactique, et la cantillation du texte biblique.

Différences entre la Babylonie et la Terre d'Israël, et entre écoles


Dans la chaîne de tradition citée par Ben Asher, le premier nom connu est celui d'un certain Nakkaï, qui aurait émigré lors des persécutions de Tinneius Rufus (s'étant produites aux environs de l'année 140 de l'ère commune) de la terre d'Israël en Babylonie, et aurait divulgué la connaissance massorétique dans la ville de Nehardea. La tradition, contenant huit noms, daterait de 340 EC. Des différences entre les écoles sont notées dès le iiie siècle EC.
D'autres divergences, probablement accentuées avec l'introduction de signes graphiques pour la cantillation, se font jour avec le temps, non seulement régionales mais locales : en Babylonie, l'école de Soura suivant la tradition de son ecole, a un codex standard incarnant sa lecture, différente de celle de Nehardea ; des différences similaires existent en terre d'Israël, entre l'école de Jérusalem et celle de Tibériade, laquelle s'impose ultérieurement sur toutes.
A cette période, la tradition a cessé d'évoluer, et les Massorètes, en préparant leurs codex, suivent habituellement une école, bien qu'ils examinent les codex standards des autres écoles, et notent les différences.

Ben Asher et Ben Naphtali 


Dans la première moitié du xe siècle EC, Aaron ben Moshe ben Asher et Moshe ben Naphtali (plus souvent appelés Ben Asher et Ben Naphtali) sont les principaux Massorètes, basés tous deux à Tibériade. Chacun rédige un codex standard de la Bible représentatif de la tradition de leurs écoles. Les différences entre ces deux écoles rivales sont significatives, mais néanmoins mineures, portant davantage sur la vocalisation et les accents que les consonnes ; par ailleurs, Ben Asher et Ben Naphtali s'accordent quant à l'opposition à d'autres autorités massorétiques, comme Rabbi Pinḥas (supposé avoir vécu aux alentours de 750 EC par les chercheurs modernes) et Moshe Moheh.
Ben Asher est le dernier représentant d'une illustre famille de Massorètes, remontant au viiie siècle. Il pourrait, ou non, avoir épousé la cause des Karaïtes, un courant scripturaliste opposé au judaïsme basé sur la tradition rabbinique, également apparu au viiie siècle EC. Cependant, en dépit de la rivalité de Ben Naphtali et l'opposition de Saadia Gaon, le plus éminent représentant de l'école critique babylonienne, le codex de Ben Asher devient reconnu comme le texte standard de la Bible.
Toutefois, aucun texte imprimé, ni manuscrit conservé, n'est entièrement basé sur Ben Asher : le codex d'Alep, annoté de sa main, a été en grande partie perdu ou détruit, bien que divers efforts, notamment de Mordechai Breuer et de l'université de Bar-Ilan aient été entrepris pour le reconstituer. Le codex de Lenigrad, basé sur des manuscrits corigés par Ben Asher, est préservé dans son intégralité, mais Ben Asher ne l'a probablement jamais vu.
Si Ben Naphtali a probablement constitué un codex similaire, celui-ci s'est totalement perdu.
Il a par ailleurs été suggéré que Ben Naphtali n'aurait jamais existé, et que ce nom, choisi d'après la Bible, où Asher et Naphtali sont les deux frères les plus jeunes de Zilpa et Bilha, servent à désigner toute tradition différente de celle de Ben Asher. Ceci est improbable, étant donné l'existence de listes d'endroits dans le Texte où Ben Asher et Ben Naphtali s'accordent entre eux pour rejeter d'autres autorités.

Au Moyen Age 


Ben Asher et Ben Naphtali amènent pratiquement la massore à son terme. Les additions ultérieures réalisées aux xiiie siècle et xive siècle par les successeurs des massorètes, lesNaḳdanim (« Ponctuateurs »), sont peu nombreuses et, généralement écrites avec une encre moins dense et une plume plus fine ; elles portent généralement sur des voyelles et accents.
Une influence considérable sur le développement et la diffusion de la littéarture massorétique est exercée au cours des xie siècle, xiie siècle et xiie siècle par l'école franco-allemande destossafistes et leurs prédécesseurs. Rabbenou Gershom, son frère Makhir, Joseph Tov Elem ben Samuel (Jospeh Bonfils) de Limoges, Rabbenou Tam, Menahem ben Perez de Joigny,Perez ben Elijah de Corbeil, Juda de Paris, Meïr Spira, et Meïr de Rothenburg réalisent des compilations massorétiques, ou des additions sur le sujet. Elles sont toutes plus ou moins fréquemment citées dans les gloses marginales des codex bibliques et dans les travaux des grammairiens hébraïques contemporains et ultérieurs.

Aux origines de la Massore 


Massore numérique 

Dans l'antiquité classique, les copistes étaient payés au nombre de stiches (vers). Comme les livres en prose de la Bible n'avaient jamais été écrits en stiches, les copistes évaluaient le montant de leur travail selon le nombre de lettres, raison pour laquelle ils furent appelés Soferim (« ceux qui comptent ») selon les Sages du Talmud. C'est ainsi que se développe au cours du temps la « massore numérique, » qui compte et regroupe les divers éléments et phénomènes du Texte. Par exemple :
  • le verset וישחט (vayish'hat, « il immola, » c'est-à-dire Lévitique 8:23) forme la moitié du nombre de versets du Pentateuque
  • tous les Noms de Dieu mentionnés en rapport avec Abraham sont saints, à l'exception d'Adonay (Gen. 28:3)
  • dix passages du Pentateuque sont ponctués
  • il est écrit trois fois dans le Pentateuque לא alors qu'il faut lire לו (tous deux se prononcent lo, mais לא signifie « non, » tandis que לו signifie « [à] lui »).
Ces informations statistiques sont d'une importance particulière dans la vérification de la bonne transmission du Texte, avec la production de copies subséquentes faites à la main. Elles sont regroupées dans la massora parva.

Massore exégétique 

Le rapport étroit qui existait auparavant (depuis les Soferim jusqu'aux Amoraïm inclus) entre celui qui enseignait la tradition et celui qui enseignait la massore, ces deux fonctions étant souvent réunies chez une seule et même personne, rend compte de l'usage de la « Massora exégétique. »
Paradoxalement, ces exégèses massorétiques s'appuient parfois sur des versions textuelles différentes du texte massorétique actuel. Ces variations sont toutefois limitées à l'écriture pleine ou défective de certains mots, c'est-à-dire à décider si une mater lectionis (une consonne utilisée comme moyen de vocalisation, comme le vav, qui peut, selon les circonstances, se comporter comme une consonne, représentée par /v/, ou une voyelle, qui peut être /o/ ou /ʊ/) doit être ou non écrite dans un mot à un endroit donné du texte.

massore grammaticale



Gen. 1:9 Et Dieu dit « Que les eaux se rassemblent ».                  les lettres sont en noir, les signes de vocalisation en rouge,signes de cantillation en bleu.
L'une des plus importantes innovations de la massore est l'invention puis l'introduction d'un système graphique de vocalisation et d'accentuation, constituant la « massore grammaticale, » car ayant contribué à l'apparition de la grammaire hébraïque.
En effet, les Massorètes, suivis des grammairiens de l'hébreu, doivent différencier entre plusieurs formes de mot trouvées dans le texte biblique, réunir les formes similaires en groupes, consigner les particularités du Texte, et élaborer des règles de prononciation et d'écriture.
Ce faisant, ils opèrent une distinction entre lettres à usage exclusivement consonantique et lettres pouvant tantôt servir de consonnes, et tantôt de voyelles. Les marques de vocalisation constituent l'héritage le plus important légué par les Massorètes aux grammairiens. Leurs travaux ne montrent cependant pas de trace de catégories grammaticales, ni d'examen des formes de langage en tant que telles ; le système de ponctuation massorétique répond davantage à une volonté de préserver le Texte dans ses moindres nuances de prononciation et d'orthographe, qu'à une intention d'investiguer le langage et ses lois. Quant au Diḳdouḳe ha-Ṭe'amim de Ben Asher, le plus éminent massorète de Tibériade, qui exposent des règles générales, particulièrement au sujet des consonnes et voyelles, ils démontrent déjà l'influence de la grammaire arabe.
Les opinions grammaticales de Ben Asher seront par ailleurs contestées par Saadia Gaon, généralement considéré comme le père de la grammaire hébraïque, qui se servira aussi de la grammaire arabe comme modèle pour ses théories.
La massore n'en pave pas moins la voie de la grammaire ; la vocalisation massorétique et l'invention des signes permettra aux grammairiens de déterminer les lois de phonétique et d'étymologie hébraïques. Ils la considèrent comme une fondation nécessaire, et une part constituante, de la grammaire, ce qui explique la préservation de son étude ; réciproquement, les « Naḳdanim (ponctuateurs), » successeurs des Massorètes, sont également des grammairiens.

Constitution de la massore 

Les notes marginales 

Des substitutions effectuées lors de la lecture publique de la Bible ont eu lieu dès l'Antiquité ; elles ont ensuite été retranscrites, en partie ou en totalité, dans des notes marginales, qui ne pouvaient figurer que dans des manuscrits privés. Frankel a démontré que ces lectures alternatives n'étaient pas inconnues de la Septante, et que celle-ci les a souvent adoptées.
  •  Ces variantes sont de trois types :




    • des mots à lire (ḳeri) en lieu et place de ceux figurant dans le texte (ketiv),
    • des mots lus mais non écrits dans le texte (ḳeri vèlo ketiv),
    • des mots écrits mais non lus (ketiv vèlo ḳeri).




Une certaine école de Massorètes utilisait le mot sebirin au lieu de ḳeri. Les lectures de cette école ne sont cependant généralement pas acceptées dans la massore, qui indique en outre qu'elles induisent en erreur (« oumaṭ'in »).

Les Tiḳḳoune Soferim 

Les sources tannaïtiques mentionnent plusieurs passages des Écritures pour lesquels il est inévitable de conclure que le texte actuel diffère de l'ancien. L'explication de ce phénomène est donné par l'expression kana hakatouv (« l'Écrit a utilisé un langage différent, » pour éviter l'anthropomorphisme et l'anthropopathisme). Rabbi Shimon ben Pazzi, un amora du iiie siècle EC appelle ce phénomène « Tiḳḳoune Soferim, » amendement des scribes, car il les suppose dus aux Soferim eux-mêmes. Cette opinion fut adoptée dans les midrashim ultérieurs ; dans les ouvrages massorétiques, on les attribue:
  • à Ezra
  • à Ezra et Néhémie
  • à Ezra et les Soferim
  • à Ezra, Néhémie, Aggée et Baruch,
ce qui revient à les faire remonter, dans tous les cas, aux membres de la Grande Assemblée.
Ben Asher remarque que l'expression correcte n'aurait pas dû être kanah mais kinouï hasoferim, mais, selon des sources plus anciennes, ce serait plutôt kinouï haktouvim, un terme dont une variante ancienne a effectivement été préservée.
Le terme tiḳḳoun Soferim a été entendu par différents savants de diverses façons:
  • Selon certains, il s'agit de corrections ou modifications apportées directement à la langue biblique, autorisées par les Soferim pour des raisons homilétiques ; c'est-à-dire que les Scribes interprétaient un euphémisme supposé, et que cette interprétation constitue le tiḳḳoun Soferim.
  • Pour d'autres, c'est un changement mental fait par les rédacteurs originels des Écritures eux-mêmes ; c'est-à-dire que ceux-ci, tout en s'abstenant de coucher sur papier une considération que le lecteur serait en droit d'attendre.
  • Au vu des diverses interprétations et du fait que ni les nombres, ni l'identité des passages corrigés par les Soferim n'est bien définie (la Mekhilta en compte 11, le Sifre 7, le Midrash Tanḥouma 13, et la massore elle-même 15 ou 18), S. Sachs et Barnes, qui le reprend sans le nommer, parviennent à la conclusion que la tradition du tiḳḳoun Soferim relève du Midrash plutôt que de la massore ; si tiḳḳoun il y a, il se rapporte donc à l'exégèse, et non à la critique textuelle, à l'interprétation et non à la lecture. La tradition du tiḳḳoun est probablement connectée à la tradition qui attribue la rédaction de plusieurs livres de la Bible hébraïque aux hommes de la Grande Assemblée.
Il existe cependant des phénomènes dans le texte biblique pour lesquels l'on est amené à admettre qu'à certains moments au moins, certaines corrections textuelles furent réalisées. Ces corrections peuvent être classifiées de la sorte :
  1. retrait d'expressions malséantes utilisées en référence à Dieu, par exemple ברך (« bénir ») est se substitue à קלל (« maudire ») dans certains passages.
  2. substitution de « YHWH » par « Elohim, » en vue de limiter la prononciation du Tétragramme.
  3. Retrait de l'application de noms de faux dieux à YHWH, comme le nom de « Ishbaal » qui devient Ishbosheth.
  4. substitution de certain noms, afin de préserver l'unité du culte divin à Jérusalem : par exemple, dans Isaïe 19:18, Ir HaHeres (la « ville du carnage »), qui devait à l'origine avoir été Ir HaHadas (la « ville du myrrhe ») ou Ir HaTzedeq (la « ville de justice »).

Mikra et 'Ittour 

Ces deux termes sont parmi les plus anciens utilisés pour décrire l'activité des Soferim Dans les académies gaoniques, le miḳra Soferim (« lecture des Scribes ») est compris comme le changement de vocalisation dans les mots que l'on fait lors d'une pause ou après un article (par exemple, eretz, « terre, » se dit he-aretz, « la terre ») ; le iṭṭour Soferim (« ornement des Scribes ») indique l'annulation dans certains passages du waw de conjonction, lequel induit un changement de temps (halakhti, « je suis allé, » devient we-halakhti, « et j'irai ») lorsque ceux-ci entraîneraient une lecture erronée.
Il a été objecté à cette explication que le mikra devrait être inclus dans la catégorie de fixation de la prononciation, tandis que le iṭṭour fait partie des qeri et ketiv. Diverses interprétations ont été proposées par des savants, anciens et modernes, sans apporter toutefois de solution satisfaisante.

Constructions « non décidées » 

Le texte massorétique comporte un certain nombre de mots (cinq selon le Talmud, huit selon les autorités ultérieures) qui n'ont pas de hekhra (prononciation fixée lors de la lecture traditionnelle) mais ont une hashaa (une prononciation suggérée).
Selon le Talmud, cette note massorétique indiquerait que les Soferim ne se sont pas prononcés sur la question de savoir si le mot appartenait à la clause suivante ou à la clause précédente.
Les chercheurs modernes rejettent cependant cette interprétation pour deux raisons :
  • tout d'abord, l'accentuation permet de fixer la construction de ces mots d'une façon très définie. Quant bien même les préposés à l'accentuation auraient dédaigné de leur propre chef la tradition, ce qui est improbable, on ne peut concevoir la façon de réciter ces mots lors des lectures publiques afin d'indiquer que la prononciation de ce mot était douteuse : le lecteur aurait de lui-même rapporté la construction non-décidée au mot la précédant ou la suivant ;
  • ensuite, certains de ces mots n'ont de sens que lorsqu'ils n'ont de sens que s'ils sont lus dans une clause donnée. Par conséquent, cette tradition se réfère là aussi à une exégèse et non à une critique textuelle. Il s'agirait d'un type de construction , dans lequel le mot est compris comme faisant immédiatement suite à lui-même. La tradition n'aurait pas décidé si ces mots devaient être lus tels quels, ou en relation avec le mot suivant.

Lettres suspendues 

Quatre mots figurent dans le texte massorétique avec des lettres suspendues au-dessus de la ligne. Si l'on sait que l'un d'eux, מנשה (Juges 18:30), est dû à une correction de l'original par respect pour Moïse (משה), afin de ne pas rappeler que certains de ses descendants se livrèrent à l'idolâtrie, l'origine des trois autres (Psaumes 80:14; Job 38:13 & 15) est incertaine. Selon certains, il s'agirait de lettres erronément prises pour des majuscules ; selon d'autres, il s'agit d'insertions tardives de consonnes faibles, originellement omises.

Mots ponctués 

Dans quinze passages de la Bible, par exemple Psaumes 27:13, certains mots sont marqués par des points situés au-dessus ou en dessous des lettres (dans certains manuscrits, ces points sont remplacés par des traits horizontaux ou verticaux), dont la signification est disputée :
  • pour certains, il s'agit originellement de marques d'effacement ;
  • pour d'autres, il s'agit de mots manquants dans certains manuscrits, dont la lecture est donc douteuse ;
  • pour d'autres encore, ces points sont un moyen mnémotechnique afin d'indiquer une lecture homilétique que les anciennes autorités avaient reliée à ces mots ;
  • enfin, ces points pourraient avoir été utilisés pour mettre en garde les copistes contre l'omission d'éléments textuels qui pourraient, à première vue ou après comparaison avec des passages parallèles, paraître superflus.
Les deux premières hypothèses ne sont pas acceptables, car de telles lectures défectueuses feraient partie du ḳeri et ketiv, lesquels sont, en cas de doute, fixés selon la version de la majorité des manuscrits.
En revanche, les deux dernières théories ont une probabilité égale.


Le paragraphe vayehi binsoa haaron de la parashatBehaalotekha, encadré par deux noun inversés

Lettres inversées 

En neuf endroits de la Bible, des signes particuliers, appelés noun hafoukha (« noun inversé ») du fait de leur ressemblance avec lalettre noun (d'autres voient plutôt une ressemblance avec la lettre resh ou avec la lettre kaf).
Selon S. Krauss, ces signes étaient à l'origine l'équivalent d'obèles, et sont importants pour la critique textuelle. Ils s'appellent selon lui shipoud (corne de bélier), lequel shipoud serait l'équivalent du paragraphos (παράγραφος), qui avait également un tel signe et servait dans le même but .

Massore au Targum Onḳelos 

Imitant la massore de la Bible hébraïque, un travail similaire a été réalisé pour le Targum Onḳelos, la traduction (et paraphrase) araméenne classique du Pentateuque. Il a d'abord été édité par A. Berliner (Leipzig, 1877), puis par S. Landauer (Amsterdam, 1896).
Selon Berliner, la massore au Targum Onḳelos aurait été compilée vers la fin du ixe siècle, ou au début du xe siècle EC.

Étude critique de la Massora 

Critique textuelle 

La critique textuelle de la Massora consiste surtout en une comparaison des diverses versions et notes disponibles. Elle nécessite donc de collecter des manuscrits et de consigner leurs différences.
Les Massorètes inaugurent le domaine, en notant à côté de la version jugée correcte par leur école, celle des autres. Dans la plupart des manuscrits, il existe des discordances entre le texte et la massora, ce qui tend à indiquer que les notes ont été copiées d'autres sources, ou que l'une d'elles n'est pas sans erreurs. C'est, entre autres, l'absence de telles discordances dans le codex d'Alep qui en fait un document si important ; le scribe qui a recopié ces notes (dont on présume qu'il s'agit de Ben Asher) avait probablement écrit les notes originales.
Au xiiie siècle, le rabbin Meïr ben Todros Ha-Lévi Aboulafia écrit le Sefer Massoret Seyag la-Torah. Une édition ne sera cependant pas disponible avant 1750, à Florence.
Au xvie siècle Jacob ben Hayim ibn Adoniya, systématise le matériel qu'il a collecté, et arrange la Massora dans la seconde édition Bomberg de la Bible rabbinique (Venise, 1524-25). Il y introduit la Massora en marge, et compile en fin d'ouvrage une concordance des notes massorétiques qu'il n'a pas pu insérer. Il s'agit du premier traité sur la Massora jamais produit. Bien que rempli d'erreurs, ce texte fut généralement reconnu comme le textus receptus de la Massora (Würthwein 1995:39), et utilisé pour la traduction anglaise de l'Ancien Testament dans laBible du roi Jacques.
Elie Lévita fait ensuite grandement progresser l'étude critique de la Massora avec son Massoret ha-Massoret en 1538. Le Tiberias de son aîné Johannes Buxtorf rend ses recherches accessibles aux chrétiens, inspirant notamment Walton, auteur de la Bible Polyglotte. Il compile aussi une vaste concordance massorétique, le Sefer HaZikronot, conservé à la Bibliothèque nationale de Paris ; ce livre n'a jamais été publié.
Au xviie siècle, Menahem di Lonzano compose un traité sur la massora du Pentateuque, intitulée Or Torah, dont s'inspire Yedidia Nortzi (ainsi que du livre de Meïr Aboulafia) pour composer son Minḥat Shai. Ce livre, basé sur une étude scrupuleuse des manuscrits, contient des notes massorétiques intéressantes.
Au xixe siècle, de nombreux adeptes de la science du judaïsme se penchent sur la question, parmi lesquels A. Geiger, S. D. Luzzatto, S. Pinsker, S. Frensdorff, H. Graetz, J. Derenbourg,I. H. Weiss, W. Bacher, etc. Par ailleurs, la connaissance sur la Massora progresse grâce à des hébraïsants chrétiens, dont Franz Delitzsch, L. H. Strack, Ad. Merx, et P. Kahle. Le plus notable est Christian David Ginsburg, Juif de naissance, qui parvient à compiler l'ensemble des notes massorétiques existantes dans le monde. Malgré sa conversion volontaire au christianisme, son édition de la Massora est considérée comme la meilleure référence en la matière, y compris dans les milieux juifs.

Critique radicale 

Il a été habituel de considérer jusqu'au xxe siècle le texte massorétique comme la tradition pharisienne elle-même, c'est-à-dire une copie de bonne qualité des écritures considérées commetextus receptus par les Juifs, qu'elles aient été reçues sur le mont Sinaï comme le voulaient ceux-ci, ou composées à partir de plusieurs sources indépendantes, selon la critique biblique.

Fragment du Livre d'Isaïe retrouvé dans la première grotte de Qumrân. Le Tétragramme apparait en caractères paléo-hébraïques
La découverte des manuscrits de Qumrân, datant de 150 AEC jusqu'à 75 EC, a considérablement modifié cette perception : leur analyse montre que les textes de cette période ne présentaient pas la scrupuleuse uniformité textuelle qui fut exigée aux siècles suivants. D'une part, les rouleaux montrent des variantes orthographiques mineures, tant par rapport aux textes massorétiques ultérieurs qu'entre eux-mêmes. D'autre part, on découvre des versions hébraïques de variantes entre le texte massorétique et la Septante, qui étaient auparavant considérées comme des amplifications et déviations textuelles lors de la traduction de la Bible en grec. Les chercheurs en concluent à l'existence d'un ou de textes pré-massorétiques. Selon L. Shiffman, 60% des textes peuvent être considérés comme proto-massorétiques, 20% comme typiques de Qumrân, avec toutefois des bases dans les textes proto-massorétiques, 5% comme de type proto-samaritain, 5% de type septantique, et 10% non-classifiés.
En dépit de ces variations, on peut toutefois considérer la plupart des fragments de Qumrân comme plus proches du texte massorétique que tout autre.
Par ailleurs, des objections ont été prononcées afin de défendre la primauté du texte massorétique : il est évident, d'après les notes de correction et les variantes alternatives, que les scribes esséniens se permettaient de choisir librement la version qu'ils jugeaient la meilleure parmi les diverses lectures ; de plus, selon Gretchen Haas, la plupart des textes s'écartant du texte massorétique, y compris quatre manuscrits de type septuagintal, ont été retrouvés dans la grotte n°4, où les textes n'étaient pas aussi précieusement conservés ; il est conjecturé que cette grotte était une gueniza où étaient entreposés les textes impropres à l'usage, car endommagés ou contenant des erreurs textuelles. Gil Student, un rabbin orthodoxe, propose également une interprétation de ces découvertes contraire à celle des académiciens, en insistant toutefois sur l'importance du postulat initial lors de l'appréhension des données archéologiques.

wikipedia

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